Dans une cité italienne ancienne, baignée par le soleil et entourée d’orangers, vivait la famille Di Vitto : la mère, Caterina, ses deux filles — Sofia et Luisa — et l’ami de toujours, le professeur Leonardo. Leur maison perchée sur une colline offrait une vue sur une mer azur, et l’air était empli du parfum de basilic frais et de sel marin.
Chaque matin, Caterina réunissait ses filles sur le balcon pour un petit‑déjeuner partagé au chant des artistes de rue. Sofia, l’aînée, se distinguait par son sérieux : elle s’occupait des tâches ménagères, veillait sur sa sœur et obtenait toujours d’excellentes notes. Luisa adorait peindre : des portraits délicats de sa mère ou des paysages côtiers, et Caterina louait sans cesse la magie de son pinceau. Dans le cœur de Sofia grandissait pourtant une jalousie silencieuse : pourquoi les talents et l’ardeur de sa sœur étaient-ils toujours plus admirés que ses propres efforts ?

Un jour, le village annonça le festival des fontaines : chaque famille devait décorer la fontaine de sa maison avec des fleurs et de l’eau. Pleine d’amour pour ses deux filles, Caterina confia à Sofia la collecte des pétales de rose et de jasmin, et à Luisa la réalisation de fresques sur des dalles de marbre racontant l’histoire du foyer. La nuit précédant le festival, Sofia ne dormit pas : elle entremêla avec soin des lys blancs aux jets d’eau sinueux, espérant que son travail prouverait que sa contribution valait autant que celle de sa sœur.
Au matin, quand le soleil se leva sur les toits, les habitants se rassemblèrent autour de la fontaine des Di Vitto. L’eau dansait sous la lumière, tandis que les pétales de Sofia jonchaient les bords, symboles de pureté et de dévouement. Les dalles de Luisa prenaient vie sous ses aquarelles délicates : rires d’enfants, repas partagés en famille. Émerveillée, Caterina prit les mains de ses filles et murmura :
« Vos cœurs et vos talents s’harmonisent comme l’eau et les lys, comme la couleur et la toile. Sans l’un, l’autre ne serait pas complet. »

À cet instant, Sofia comprit : l’amour d’une mère est multiple et complexe, comme les motifs du tableau de Luisa et comme la fraîcheur des lys dans l’eau. Sa rancune fondit, remplacée par la fierté et la joie : car ensemble, elles avaient créé quelque chose de véritablement magnifique. Les villageois gardèrent longtemps en mémoire cette fontaine, symbole d’unité et d’amour sincère capable de dissiper tous les doutes.
